Ostéo mag a publié en 2015 un article qui est encore plus d'actualités aujourd'hui :
Dans son édition de septembre 2013, le JAOA publie un article étonnant sur le rôle de la médecine ostéopathique lors des épidémies de grippe. Son auteur, le docteur Mueller, est connu pour ses publications à haut niveau de preuve. Il nous présente aujourd’hui le rôle de l’ostéopathie dans le combat contre la grippe, … notamment porcine ! Il se base sur les chiffres de la pandémie de grippe espagnole de 1918-1919 pour démontrer que la prise en charge est essentielle, en complémentarité de la vaccination, des anti-viraux et de la prophylaxie.
Lors de cette pandémie, il y aurait eu 40 millions de morts à travers le monde. Les ostéopathes américains de l’époque auraient tenu des journaux de bord pour répertorier le nombre de patients soignés et guéris. Les ostéopathes DO américains auraient alors remarqué que leurs patients avaient plus de chance de survie que les autres. Ces éléments ont été rapportés par un certain docteur Smith dans sa « conquête ostéopathique de la maladie, là où la médecine a échoué » (JAOA, 1920). Plus de 100 000 patients auraient été soignés par 2 445 ostéopathes. Ils auraient obtenu un taux de mortalité de 0,25 % alors que les chiffres classiques étaient de 6 %.
Un autre ostéopathe, M. Riley de Chicago (JAOA, 1919), aurait publié des taux similaires. Ces données extraordinaires doivent être interprétées dans le contexte de l’époque : la médecine conventionnelle était encore basée sur l’empirisme, les remèdes étaient très fréquemment toxiques et les maladies interprétées comme des évènements divins. Evidemment, pas de groupe contrôle, encore moins de placébo. Pas non plus de charte éthique, ni de règles par rapport à une éventuelle interprétation des résultats.
Le docteur Mueller reprend néanmoins un autre texte publié dans le JAOA, en 2005 par le docteur Patterson ainsi que l’éditorial du docteur d’Alonzo GE Jr (2004). Ces deux médecins ostéopathes américains soulignent qu’aujourd’hui, aucun pays ne serait prêt à faire face à une pandémie. Des plans d’action ont été imaginés par les gouvernements, mais le système de santé ne pourrait s’adapter à un trop grand nombre de malades. Les résultats seraient alors dramatiques, car les personnes atteintes n’auraient pas accès au meilleur niveau de soin. L’organisation mondiale de la santé dispense régulièrement des formations afin d’enseigner les principes d’isolement en quarantaine et les gestes prévenant la transmission des virus.
Heureusement, de nombreux ostéopathes pourraient venir à leur rescousse, blouse à manche courte sur le dos et masque de protection sur le nez. Tout d’abord, il faudrait faire vite : pour plus de réussite, le patient doit être soigné au cours des 24 heures suivant les premiers symptômes. Le protocole de 1918 est constitué de techniques de tissus mous, dirigées de manière spécifique sur les muscles profonds de la colonne vertébrale, ainsi que la mobilisation de celle-ci. Des techniques lymphatiques ont été utilisées durant les épidémies de 1928 et 1936, ainsi que des mobilisations des cervicales et des thoraciques hautes. La prise en charge était également adaptée en fonction des symptômes et des dysfonctions somatiques du patient.
L’article de Hruby et al. de 2007 allait encore plus loin, avec un protocole détaillé d’une trentaine de techniques à réaliser par les ostéopathes, notamment pour stimuler le système lymphatique. Les différents auteurs soulignent que l’ostéopathe pourrait enseigner ces techniques aux membres de la famille, afin qu’ils traitent leurs malades quotidiennement.
Pourquoi autant de littérature sur le sujet de la grippe ? Tout d’abord parce que les américains sont fans des scénarios apocalyptiques. Le JAOA étant payant, il faut encourager les éditos novateurs sur des sujets populaires.
Mais aussi tout simplement parce que la recherche ostéopathique a révélé que les techniques ostéopathiques auraient un effet sur les systèmes lymphatique et immunitaire. L’étude de référence est celle de Noll et al. (2000) qui démontre que la prise en charge ostéopathique quotidienne semi-standardisée de patients hospitalisés souffrant de pneumonie est efficace : les patients ont besoin de moins de médicaments (l’antibiothérapie semble fonctionner plus rapidement) et restent moins longtemps à l’hôpital.
D’autres études sur le modèle animal ont montré que l’ostéopathie avait une action lymphatique importante, Knott et al. (2005) montrent que des techniques ostéopathiques de pompage augmentent la circulation lymphatique des chiens. Les nombreux travaux de Lisa Hodge démontrent avec un très haut niveau de preuve l’effet des techniques lymphatiques sur le système immunitaire des rats (voir également notre article Effets des techniques de pompage lymphatique pendant un cancer paru dans L’ostéopathe magazine n°15)
Le docteur Mueller ne part pas du principe que les ostéopathes sauveront le monde de la prochaine pandémie de grippe, mais il utilise cette idée pour discuter des avancées de la recherche en ostéopathie et des effets secondaires liés à l’utilisation des antiviraux ainsi que de leur coût.
Références : Smith RK: One hundred thousand cases of influenza with a death rateof one-fortieth of that officially reported under conventional medical treatment. J Am Osteopath Assoc 1920, 20:172-175. Reprinted in: JAOA, 2000;100:320–323. Riley GW: Osteopathic success in the treatment of influenza and pneumonia.
J Am Osteopath Assoc 2000, 100(No. 5):315-319. August 1919. Reprinted in JAOA
Patterson MM. The coming influenza pandemic : lessons from the past for the future. J Am Osteopath Assoc 2005;105(11):498-500
D’Alonzo GE. Influenza epidemic or pandemic ? Time to roll up sleeves, vaccinate patients, and hone osteopathic manipulative skills [editorial]. J Am Osteopath Assoc 2004;104:370-371
Noll DR, Degenhardt BF, Morley TF, Blais FX, Hortos KA, Hensel K, Johnson JC, Pasta DJ, Stoll ST. Efficacy of osteopathic manipulation as an adjunctive treatment for hospitalized patients with pneumonia: a randomized controlled trial. Osteopath Med Prim Care 2010;4:2